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23 avril 2021

Participer au changement

Par Marianne Lavoie
Bienvenue dans la tête d’une des écolos d’Écoscéno!

Moi, c’est Marianne. J’ai fait mes études en scénographie et je fais partie de l’équipe d’Écoscéno depuis janvier 2020. Je suis aussi une vraie milléniale, ce qui signifie que j’ai grandi avec le zèle de réutiliser les sacs ziploc et la détermination de transporter mon épicerie sans sac, quitte à remplir mon manteau et mes poches. Comme de fait, je suis végétarienne. Je suis le portrait tout craché de ma génération: essayer de sauver la planète un geste à la fois, c’est un acquis depuis l’enfance.

Pourquoi passer de la conception à l’environnement?

Bien que mon bagage soit la conception scénique, j’ai bifurqué pour me réorienter vers l’écoresponsabilité. Ce changement de cap est la conséquence d’une désillusion que j’ai vécue face à ma pratique il y a quelques années. Désillusion qui s’est transformée en désir de participer activement au changement.

Mon désenchantement a eu lieu lors du premier démontage théâtral auquel j’ai assisté. Pour les familiers.ères avec le monde scénique, il est inutile de vous illustrer le sort des matériaux après une production. Pour les autres: considérez que la majorité des majestueux décors que vous avez admirés sont dirigés vers les sites d’enfouissement. J’ai donc été bouleversée par cette triste réalité, d’autant plus considérant le caractère très éphémère des décors. Le pire? C’est que lors de ce premier démontage, j’étais en grande partie la source de ces déchets. Alors que je dessinais mes idées de décors sur le verso de feuilles utilisées, je n’avais pas songé au sort du décor une fois les rideaux tombés. Un peu à l’instar du bac recyclage qui amenuise notre culpabilité, j’espérais que les éléments soient conservés ou triés. Comme s’il existait un système de prise en charge des décors. Je ne m’étais alors pas rendue compte que nous, les concepteurs.trice.s, nous participons à ce système de consommation et y avons un rôle important à jouer. Les concepteurs doivent avoir une vision globale et comprendre la mécanique de la vie des décors pour leur permettre une seconde vie.

Comment changer la pratique de concepteur?

Changer ses actions individuelles est une chose, mais changer sa pratique en est une autre. Dans la foulée de la révolte collective de 2019, incarnée par le mouvement de grève de Greta Thunberg, du Pacte pour la transition, des marches pour la Terre, j’ai sauté à pieds joints dans le changement. J’ai parié que oui, notre milieu peut changer. Pour ce faire, j’ai entamé une maîtrise en Design de l’environnement pour faire de la recherche et surtout je développe des initiatives avec Écoscéno. J’ai la chance d’être aux premières loges de la mise en place de projets d’économie circulaire et d’écoconception appliqués au théâtre. Cependant, pour en arriver à un réel changement global, mon hypothèse est qu’il faut d’abord partager des exemples inspirants et ensuite dialoguer.

Le changement par l’exemple

L’écoanxiété peut être paralysante. Pour transformer ce sentiment d’impuissance en action, je suggère d’abord de mettre de côté les discours alarmistes et défaitistes. Plutôt, je propose de mettre de l’avant les initiatives mises en place, car il en existe une panoplie et elles poussent tout autour de nous.

Voici deux exemples qui m’inspirent au quotidien, réalisés par des humains créatifs et ingénieux:

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Monarch Sanctuary — Mitchell Joachim (archinode.com)

Le Monarch Sanctuary

Ce sanctuaire à monarques est une tour à bureaux qui trônera bientôt en plein Manhattan. Sa particularité est d’abord d’être avant tout un vivarium à monarques. Elle abrite un environnement idéal pour ces papillons migrateurs, en plus d’agir comme pouponnière pour accroître la population. D’une part, ce projet est saisissant parce qu’il associe créativité et utilité pour répondre au déclin de la population de monarques. D’autre part, cette solution originale remet en question notre mode de vie sans altérer la notion de confort. Au contraire, cette proximité avec la nature améliorera la santé mentale des travailleurs.euses.

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The Living Stage — Tanja Beer

The Living Stage

Plus proche de notre milieu, voici la pièce The Living Stage. La scénographe australienne Tanja Beer a conçu un décor en matériaux de seconde main, en plus d’être «recyclable, compostable et comestible». Qui plus est, la pièce avait la mission pédagogique de former sa communauté sur le jardinage et l’origine des aliments. Non seulement le décor a-t-il été en partie récolté et consommé par l’audience, mais les légumes restants ont été redistribués dans des jardins communautaires. Le décor a donc été conçu en fonction de la matière existante et des besoins de la communauté.

Le Monarch Sanctuary et le décor de Tanja Beer illustrent à quel point le génie créatif humain peut bâtir le monde de demain! Ce sont des exemples de design régénératifs, c’est-à-dire qu’ils redonnent à leur écosystème et leur communauté. Dans le milieu théâtral, les initiatives d’écoresponsabilité sont de plus en plus présentes, que ce soit Broadway Green Alliance aux États-Unis, le Festival d’Aix en Provence ou Fringe en Écosse. Ils témoignent de la possibilité de participer activement au changement. Que dis-je, d’être le changement!

Le changement par le dialogue

Pour qu’un changement soit global, il faut d’abord de la collaboration. Par là j’entends une collaboration avec sa communauté de pratique et sa communauté sociale. Ensuite, il faut une ouverture. Une ouverture autant personnelle, apte à accepter une réalité qui brusque, qu’une ouverture d’esprit à repenser le monde de demain.

Un atout de mon jeune âge de milléniale est d’avoir beaucoup à apprendre. Et pour y arriver, je m’adresse à vous cher.e.s artisans du milieu culturel. À tous ceux et celles qui ont des années d’expérience dans le domaine, comment peut-on apprendre de votre expérience? Avez-vous des pistes de solutions et des idées à proposer? Des techniques à partager avec la communauté? Nous gagnerions tou.te.s à apprendre de votre expertise.

Contactez-moi. Parlez-moi de votre expérience et je la partagerai avec la communauté. Que vous ayez une pratique durable ou soyez réticent.e.s, je veux vous entendre et comprendre. Bâtissons une résilience toutes et tous ensemble!